PAROLE D'EXPERT 2
Publié le 06/08/2018
Expert en stratégie digitale, communication et nouvelles technologies, Thierry Barbaut, membre du comité des experts nous éclaire sur l’innovation et la Tech africaine.
Aujourd’hui, l’Afrique représente la première région au monde, où l’on observe un grand dynamisme dans les domaines de l’innovation. A quoi est-ce dû, selon vous ?
L’innovation est poussée par deux principaux facteurs: le développement de la communication qui est exacerbé par le fait que l’Afrique est le “mobile first continent” avec plus d’un milliard de cartes SIM actives. Les communautés, les entreprises, les états sont désormais connectés entre eux et au reste du monde. Ensuite, la capacité que peuvent avoir les entrepreneurs à trouver des solutions adaptés culturellement et localement à leurs besoins. La réponse à ces besoins c’est logiquement l’innovation en trouvant ou en détournant des solutions existantes qui ne sont d’ailleurs pas systématiquement technologiques. Une innovation par définition doit être un nouveau processus simple, pratique et démultipliable.
Quand les entrepreneurs se connectent, innovent et partagent cela provoque cette révolution qui finalement touche les besoins essentiels: la santé, l’éducation, l’agriculture, le social et bien sur l’énergie.
On assiste depuis quelques temps au foisonnement de plusieurs concours et prix organisés à l’endroit des startups africaines, pour « favoriser l’innovation » ; quel est votre regard sur cette tendance ?
Je suis mitigé car il est finalement difficile pour un entrepreneur de déchiffrer cet écosystème tant il est tentaculaire. Il faut faire la distinction entre une “opération de communication” avec un concours qui va recevoir 1 000 projets et en faire un lauréat et un concours comme les prix EDF Pulse Africa, où les candidats retenus vont être suivis, coachés, financés et accompagnés. La formation, l’accompagnement et le suivi sont des fondamentaux pour la réussite d’un projet quel que soit la thématique. Avec l’Agence des Microprojets dont je suis responsable numérique nous soutenons une centaine de projets par an, et tous sont accompagnés, même les non lauréats. Nous allons évaluer les projets sur place afin de recueillir et capitaliser sur les bonnes pratiques pour ensuite aider et conseiller les nouveaux porteurs de projets. L’accompagnement en France et localement est une des clefs de la réussite du programme qui fait que nous n’avons pas plus de 4% d’échec sur les projets depuis 35 ans !
Il faut donc des appels à projets, des concours et surtout des financements. Mais avec des instructeurs, des bailleurs, des accompagnateurs passionnés par les thématiques, les régions et les cultures des projets soutenus. Un concours doit savoir aussi, comme le fait le prix EDF Pulse Africa, évoquer les éditions précédentes et mettre en avant les acteurs et leurs projets. Il faut que l’esprit “concours” permette aux acteurs de se challenger mais sans devenir trop exclusif.
Vous avez accepté de faire partie de l’équipe des experts réunis pour cette deuxième édition des Prix EDF Pulse Africa ; Qu’est-ce qui vous a motivé ?
Je suis passionné depuis 20 ans par l’Afrique et le numérique et je vois enfin ces passions en synergie. L’Afrique est connectée mais elle est aussi numérique et innovante et avec le prix EDF Pulse Africa qui ajoute la thématique de l’énergie à cet essor c’est une voie ouverte vers le développement des communautés par le biais des projets soutenus. Quoi de plus motivant pour un passionné comme moi !
Pensons aux bénéficiaires qui vont se compter par milliers sur ces projets soutenus. Sans énergie, pas de numérique, pas d’eau, pas d’agriculture pas de santé pas d’éducation. Le numérique et l’énergie sont pour moi les deux piliers du développement de l’Afrique et y participer avec le prix EDF Pulse Africa est un honneur.
Les grandes entreprises françaises et internationales devraient prendre modèle sur le concours EDF Pulse Africa en y développant des appels similaires.
Personnellement c’est aussi passionnant d’instruire et de découvrir les ambitions des projets et les profils de ceux qui les déposent. Des parcours de jeunes africains qui font indubitablement la puissance du continent pour les années à venir. Le prochain Bil Gates, Larry Page ou Elon Musk est parmi eux et c’est aussi à nous de leur donner une chance.